Le Franco-Rwandais Claude Muhayimana, 60 ans, a été condamné jeudi 16 décembre par la cour d'assises de Paris à 14 ans de réclusion criminelle. Il a été reconnu coupable de complicité de génocide et complicité de crimes contre l'humanité pour son rôle en 1994 lors de l'extermination des Tutsis du Rwanda.
Aux 100 questions qui leur étaient posées, les jurés ont répondu que Claude Muhayimana était complice de génocide pour avoir été le chauffeur des miliciens armés jusqu’aux collines de Bisesero, de Gitwa et de Karongi, où s’étaient réfugiés les tutsis, entre le 7 avril et le mois de juin 1994. Et ils ont estimé qu’il n’avait pas été contraint à le faire.
C’est le premier citoyen ordinaire à être jugé et condamné en France pour avoir été impliqué dans le génocide rwandais. Quinze années de réclusion avaient été requises contre Claude Muhayimana.
Pour Daphrosa Gauthier, du collectif des parties civiles du Rwanda, c’est une satisfaction même si elle est mitigée. « On ne s’est pas trompé, on ne s’est pas trompé de bonhomme : il a été jugé par un jury populaire qui ne connait pas le Rwanda, qui appréhendait le génocide pendant ces quatre semaines qui viennent de passer. Il a eu 14 ans, personne ne peut se réjouir, mais malgré tout, c’est une peine relativement clémente pour un génocide ».
Un appel envisagé
Les jurés n’ont cependant pas jugé Claude Muhayimana coupable de génocide ni à Kizenga ni à l’école de Nyamishaba, ni à partir du mois de juillet. Ces éléments qui encouragent son avocat, Philippe Meilhac, à faire appel : « Il y a encore quelques accusations pour lesquelles il a été innocenté. Alors il reste encore effectivement du chemin, mais le combat sera mené jusqu’au bout, et je suis convaincu qu’en appel, nous parviendrons à le faire innocenter. » La procédure pourrait donc durer encore quelques années.
Claude Muhayimana avait brièvement pris la parole en tout début de matinée avant que les jurés ne se retirent pour délibérer. « Je voudrais que vous essayiez de vous mettre à ma place en 1994, ce que j'ai fait pour sauver des gens », avait dit le Franco-Rwandais. C’est la thèse avancée par la défense pendant le procès : l’ancien chauffeur d’hôtel dans la région de Kibuye, aujourd’hui cantonnier à Rouen dans le nord-ouest de la France, aurait transporté des tueurs sous la « contrainte » pendant le génocide rwandais.
Un « acteur du génocide »
L’accusation au contraire a estimé que Claude Muhayimana fut un « acteur du génocide », un « rouage indispensable dans le dispositif de cette traque des Tutsis ». Cet homme « a contribué au génocide en tant que conducteur et transporteur des tueurs sur une très longue période de trois mois », a de son côté déclaré le ministère public. Ils citent notamment les témoignages de Rwandais entendus par la cour, des rescapés du génocide, mais aussi d’anciens tueurs détenus au Rwanda et interrogés par visioconférence.
Claude Muhayimana est le quatrième Rwandais condamné pour génocide en France. En mai prochain, s’ouvrira le procès de l’ex-préfet Laurent Bucyibaruta.
RFI