Les avocats de Félicien Kabuga, « financier » présumé du génocide des Tutsi en 1994 au Rwanda, a demandé l’arrêt des poursuites contre leur client qu’ils affirment « inapte à être jugé », dans une requête consultée dimanche par l’AFP. Arrêté le 16 mai 2020 dans la banlieue de Paris après 25 ans de cavale, Félicien Kabuga est notamment accusé d’avoir participé à la création des milices hutu Interahamwe, principaux bras armés du génocide de 1994 qui fit plus de 800.000 morts selon l’ONU, essentiellement au sein de la minorité tutsi.
Aujourd’hui âgé de 84 ans selon son mandat d’arrêt, et de 87 ans selon ses dires, il est actuellement détenu à La Haye, dans l’attente de son procès devant le Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI), chargé d’achever les travaux du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).
Son procès ne devrait pas commencer avant plusieurs mois.
Dans une requête déposée le 6 mai devant l’antenne du MTPI d’Arusha (Tanzanie) et consultable sur le site internet de cette instance, l’avocat français Emmanuel Altit affirme, en se basant sur des rapports médicaux qui ont été expurgés du document publié, que « la Chambre peut constater que Félicien Kabuga est inapte à être jugé ».
« Poursuivre la procédure dans ces conditions constituerait une atteinte si importante aux droits de Félicien Kabuga qu’elle remettrait en cause l’équité même du procès (…). La Chambre et les parties disposent désormais d’éléments suffisants pour constater que l’arrêt de la procédure s’impose », ajoute-t-il.
Si cette requête était rejetée, il demande « à titre subsidiaire, de prononcer la mise en liberté provisoire » de Félicien Kabuga.
Dans un entretien avec l’AFP, Donatien Nshimyumuremyi, fils aîné de Kabuga, avait récemment affirmé que l’état de santé de son père s’était considérablement détérioré.
« Nous pouvons affirmer sans ambages qu’il est physiquement et mentalement inapte, non seulement à être jugé mais aussi à instruire un avocat », avait-il assuré.
« En plus de beaucoup d’autres pathologies chroniques comme on peut en avoir à son âge, il souffre d’une autre maladie sévère bien documentée qui altère ses fonctions cognitives. D’autre part, il a déjà fait deux chutes en prison avec des conséquences graves », avait-il ajouté.
Ancien président de la Radio télévision libre des Mille collines (RTLM), qui diffusa des appels au meurtre des Tutsi et participa à une campagne anti-belge, M. Kabuga est mis en accusation par le MTPI notamment pour « génocide », « incitation directe et publique à commettre le génocide » et « crimes contre l’humanité (persécutions et extermination) ».
Africa Radio