L’article 25 du Pacte international relatif aux droits civiques et politiques, dont la RDC est un Etat partie, stipule que : « Tout citoyen a le droit et la possibilité … de voter et d’être élu, au cours d’élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l’expression libre de la volonté des électeurs ». Et le vote étant la manière dont le peuple peut s’exprimer par des voies démocratiques sans armes ni un coup d’Etat, la seule voie pour abolir les régimes dictatoriaux.
En République démocratique du Congo, le peuple congolais est habitué à une « escroquerie électorale dans sa lutte démocratique depuis l’organisation de toutes premières élections présidentielles et législatives après le règne du Maréchal MOBUTU ».
Pour aborder cette question des élections en RDC, nous nous sommes entretenus avec Didier Amani Sangara, analyste indépendant. Interview.
Bonjour Monsieur Didier Amani Sangara ! Vous venez de faire une analyse sur comment les élections sont organisées en RDC et vous avez conclu en disant que la République démocratique du Congo est habituée à une escroquerie électorale. Qu’est-ce que cela signifie exactement ?
Didier Amani Sangara : Bonjour, l’escroquerie électorale est « le fait pour une personne usant de ses compétences et pouvoirs de se permettre dans le but de favoriser un candidat, de lui ajouter des voix alors qu’il ne les a pas réalisés et faire échouer celui qui a été effectivement élu ». C’est l’exemple de la République démocratique du Congo à chaque fois où elle organise les élections sur son territoire dans sa lutte démocratique. Ce qui est regrettable !
Malgré la détermination du peuple congolais, qui a démontré qu’il était déterminé à participer au processus démocratique ; le processus électoral organisé est constitué de beaucoup d’obstacles et des irrégularités. Il est opaque et s’accompagne des violences parfois graves. Il ne permet pas d’arriver à l’unanimité quant à l’acceptation des résultats.
N’avez-vous pas pu remarquer que les élections sont organisées en RDC sous une main de celui qui veut les remporter. C’est ça … Elles fonctionnent par le fameux collège électoral ou par désignation au lieu d’un vote populaire. Ce qu’on peut appeler l’aventure de la démocratie en République démocratique du Congo. Un bastion d’un régime autoritaire ou de coup de force où le peuple congolais est pris en otage.
Le plus étonnant encore, cher journaliste, est que tout ceci se fait avec l’appui logistique et financier de la communauté internationale et les agences des Nations Unies donneurs de bonnes leçons qu’elles n’appliquent pas. La classe politique congolaise et la communauté internationale devraient accepter ou être conscientes de l’existence d’une crise politique en RDC dont elles sont les promotrices. Car, le nœud du problème à cette crise politique est la « répartition ou le partage des sièges constitutionnels avant l’électorat qui se déroule avec l’objectivité d’organiser les élections crédibles et transparentes ».
Voilà en quelques mots ce que signifie exactement l’escroquerie électorale.
Amani Sangara, dans votre analyse que vous avez rendu public, vous accusez la Ceni d’avoir biaisé les résultats en RDC. Qu’est-ce qui est à la base de votre motivation ?
En vérité, je ne suis pas le premier ni le dernier à le faire. Mais je pense que le peuple congolais a le droit de connaitre la vérité sur ce point, sur comment les résultats des élections ont été fabriqués dans leur pays. J’aimerais rappeler à mes compatriotes que les premières élections démocratiques depuis la chute de Mobutu, ont été organisées en 2006, grâce au soutien indispensable logistique et financier de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). Comme en 2006, les élections suivantes de 2011 n'ont pas été exemptes de violences. Elles ont aussi été entachées par de nombreuses irrégularités et suspicions de fraudes suscitant d’importantes contestations. En 2006, l'Union européenne et la Commission européenne ont « félicité » Joseph Kabila pour sa victoire, tandis que la Belgique, ex-puissance coloniale, s'était contentée de "prendre note" des résultats et que Paris avait salué « le civisme » des Congolais. Ce qui me pousse encore à parler d’une escroquerie électorale.
En 2011, parlons manipulations des chiffres
Pour Gérald Gerold, l’observateur des élections en République démocratique du Congo qui faisait partie de l’équipe de la mission d’observation de l’Union européenne dans une interview accordée à Afrikarabia, il témoigne qu’en 2011, on avait manipulé les chiffres pour faire en sorte que l’opposant Etienne Tshisekedi ne soit pas élu. En 2018, on a véritablement fabriqué des résultats de toutes pièces pour faire élire son Félix. Pour fixer un ordre de grandeur, on avait dû « déplacer » un peu plus d’un million de voix en 2011, alors qu’en 2018, selon une étude du Groupe d’études sur le Congo (GEC), on serait sur une fraude de 3,5 à 4 millions de voix, sans compter toutes les manipulations sur les élections législatives et provinciales.
Fabrication des résultats 2018
Vous comprendrez qu’ils ont manipulé les chiffres en 2011 et les ont fabriqués encore en 2018. Les missions d’observation de la Conférence épiscopale (Cenco) ou de la société civile (Symocel) ont rendu des rapports très clairs prouvant que celui qui a été désigné vainqueur de la présidentielle n’était pas celui qui avait reçu le plus de voix. D’autre part, les fuites récoltées des listings de la Commission électorale (Ceni), qu’elle n’avait d’ailleurs jamais contesté, montraient très clairement que parmi les trois principaux candidats, celui qui arrivait en tête était Martin FAYULU.
Voilà la raison de ma motivation pour faire connaitre au peuple congolais que depuis 2006 jusqu’à 2018, son sentiment d’expression par des voies démocratiques sans armes ni un coup d’Etat a été bafoué par la classe politique congolaise au pouvoir avec l’appui de la communauté internationale.
Les partisans de l’opposition avaient commencé à marcher contre la machine à voter, qui était un outil de Joseph Kabila, selon eux, pour truquer les résultats des élections. Pensez-vous que cet outil numérique avait contribué à la tricherie ?
Bien sûr, vous avez aussi peut être lu le rapport du chercheur à la Fondation pour la Recherche Stratégique (FRS), qui dévoile que « 3,5 à 4 millions de voix ont été manipulées ». Ce spécialiste des élections au Congo explique également comment la machine à voter a permis au pouvoir d’avoir « un temps d’avance » pour « fabriquer » la victoire de Félix Tshisekedi. La machine à voter a donc sûrement permis aux dirigeants de la Ceni et aux autorités politiques de connaître les résultats avec un temps d’avance. Ce qui expliquerait pourquoi on a arrêté le travail des centres locaux de compilation au niveau des circonscriptions.
C’est-à-dire que lorsque la Ceni a promulgué les résultats provinciaux et de la présidentielle, 20% des centres locaux de compilation continuaient de travailler sur la présidentielle et aucun n’avait commencé à regarder les procès-verbaux provinciaux ! La machine à voter a permis aux responsables de la Ceni de bloquer le travail de compilation et de fabriquer les résultats.
Et plus d’un million de Congolais ont été empêchés de voter dans trois zones du pays dominées par l’opposition, où les scrutins ont été reportés au mois de mars 2019, chose qui n’a pas été faite. D’autres électeurs ont été dans l’impossibilité de voter en raison de la fermeture à la dernière minute de plus de 1000 bureaux de vote dans la capitale, Kinshasa, de problèmes concernant les machines à voter électronique et les listes électorales, et de l’ouverture tardive de nombreux bureaux de vote à travers le pays. S’ils sont parvenus à tricher au niveau de la capitale, donc à Masisi, Lubero, Shabunda, Kindu, … C’était grave. Signalons aussi que les personnes vivant avec handicap, âgées ou illettrées se sont heurtées à des difficultés particulières dans les bureaux de vote ou pour utiliser les machines à voter, qui étaient mises en place pour la première fois en RD Congo. Même les observateurs se sont également vu refuser l’accès à de nombreux bureaux de vote et centres de dépouillement.
Raison pour laquelle, j’ai le sentiment que la Ceni ne travaille pas pour la transparence de cette élection, mais travaille plutôt à la destruction des preuves. Il serait normal d’avoir une liste complète des résultats pour savoir le nombre de voix qu’a obtenu chaque candidat, aux présidentielles, aux législatives et aux provinciales. Je me demande d’ailleurs comment ces candidats peuvent constituer des recours sérieux pour faire valoir leurs droits sans aucun chiffre officiel ! Et le fruit nous a avons déjà : la crise entre le FCC et le CACH.
Si les élections organisées en République démocratique du Congo marchent sur la voie d’escroquerie électorale, selon vous, que doit être la solution définitive ?
Le vote étant la manière dont le peuple peut s’exprimer par des voies démocratiques sans armes ni un coup d’Etat, la seule voie pour abolir les régimes dictatoriaux ; pour éviter encore le triste exemple du monde entier dont la RDC est habituée lors de l’organisation des élections, nous recommandons ce qui suit :
- A la communauté internationale : de faire respecter l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civiques et politiques, dont la RDC fait membre, qui stipule que : « Tout citoyen a le droit et la possibilité … de voter et d’être élu, au cours d’élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l’expression libre de la volonté des électeurs ». En respectant cet article 25, pour une fois en RDC, l’organisation des élections se ferait au suffrage universel direct selon la constitution et on pourrait barrer la route à qui que ce soit qui souhaite organiser les élections présidentielles au suffrage indirect qui est une déclaration de guerre à la nation congolaise.
- Il faudrait organiser des consultations sur les réformes électorales en débattant surtout sur les 7 conditions à défaut pour que les élections ne soient pas NULLES. L’élection étant un processus complexe, une machine aux multiples rouages, il faut que chacun de ceux-ci fonctionne impeccablement pour que l’élection puisse être valable. Si un seul de ces rouages est défectueux ou grippé, cela met à néant la validité de tout le processus et les élections sont nulles. Il est indispensable que TOUTES ces conditions soient réalisées EN MEME TEMPS. Sans quoi l’on s’expose aux pires aventures telles que celles dont la RDC donne pour son malheur, le triste exemple du monde entier. Dans ce pays, en effet, aucune de ces sept conditions n’a jusqu’ici été respectée ;
- Faire appel à la dissertation politique congolaise où tout candidat devra présenter son projet de société se basant sur la bonne gouvernance en RDC. Tout comme une banque à laquelle vous demandez un prêt s’assurera que vous répondez à ses critères de qualification avant que l’argent ne change des mains, la CENI ferait de même avant de recruter les gens qui n’ont pas la tête de l’emploi ou de diriger. S’assurer de connaitre les gens avant de les endosser et s’appliquer à leur ouvrir des portes. Et d’ailleurs, il faut connaitre leur réputation, consulter leur plan d’action (leurs projets de société) à travers les débats contradictoires quant à l’usage qu’ils feront de l’investissement et savoir comment ils entendent rembourser le peuple sous forme de la bonne gouvernance (de résultats). Voilà, c’est-à-dire, que les emprunteurs du peuple devront rendre des comptes ; un bon rendement sur le « prêt ». Pourquoi ? Parce que c’est un investissement que le peuple fait et le peuple a droit d’en attendre un rendement. Si le rendement n’en vaut pas la peine, vous devriez investir votre argent ailleurs. Vous savez, « Il serait insensé d’agir autrement ». L’idéal démocratique réside dans la prise en compte du désaccord, des divergences d’opinions qui caractérisent la vie sociopolitique. Le débat contradictoire représente alors le levier permettant l’émergence d’une solution éclairée, d’un consensus dépassant les positions antagonistes ;
- Si le bon fonctionnement du pouvoir public exige des réformes institutionnelles pour une démocratie rénovée pour tenter de retisser un lien de confiance entre le peuple et ses représentants, alors, il faut revoir la répartition des sièges constitutionnels et soutenir le retour de l’élection présidentiel à deux tours ;
- Au-delà de ça, il serait bon de confier à l’Eglise catholique l’organisation des prochaines élections en RDC ;
- Et pourquoi une pluie des parties politiques ? La RDC a besoin seulement de deux partis politiques ; L’Est et l’Ouest. Ces deux partis politiques peuvent recevoir de l’Etat des subventions destinées à financer leurs campagnes électorales ou leurs activités, dans les conditions définies par la loi. Une loi organique déterminerait le statut de ces deux partis politiques. Ces agissements actuels de tous ces regroupements en République démocratique du Congo dans la lutte de pouvoir alors que le pays est à sang paralysent le pays et laissent champ ouvert aux violences et à l’instabilité politique. Nombreux sont ceux qui se demandent comment les personnes qui devraient être au service du peuple peuvent se battre pour des positionnements politiques quand la vie de la nation congolaise est en danger. Un comportement des gens qui n’ont pas l’amour de la patrie. Les ennemis de la société congolaise et qui bloquent le train du progrès pour cette société. Les élites qui n’ont pas du patriotisme. Ici, on peut parler des antivaleurs dans le leadership congolais. Chacun veut avoir sa part et plier ses bagages après son temps, aucune réalisation pour le bien-être de tous, le vol sur vol, la corruption sur corruption, massacres, tueries, insécurité, … donc l’Etat est mort au Congo Kinshasa cher journaliste !
Voilà ! Je pense que la mise en application de ces 6 recommandations donnerait une solution définitive pour empêcher l’escroquerie électorale dont la RDC est habituée à faire.
Propos recueillis par Dieudonné Mango