Au Burundi, la Commission nationale électorale (Céni) a proclamé, ce lundi 25 mai dans l’après-midi, les résultats provisoires des élections présidentielle, législatives et municipales du 20 mai. Et c’est donc, selon ces chiffres, le général Évariste Ndayishimiye, le candidat du parti au pouvoir, qui l’emporte avec une très large victoire. Ces résultats ont d’ores et déjà été contestés.
Aucune surprise cet après-midi. La Céni a annoncé, comme attendu, une très large victoire pour le candidat du parti au pouvoir, le général Évariste Ndayishimiye.
La seule incertitude concernait le pourcentage qui allait lui être attribué : 68,72 %. C’est moins que ce que laissaient entrevoir les résultats communiqués jusqu’ici par la Commission électorale du Burundi.
Son principal challenger, Agathon Rwasa, avait déjà contesté cette victoire donnée à 24 %. Lui et son parti, le CNL, ont ainsi dénoncé une cérémonie de publication des résultats d’un triple scrutin que son porte-parole a qualifié lundi soir, de « mascarade électorale » entachée par des « fraudes massives ».
Thérence Manirambona assure que c’est plutôt Agathon Rwasa qui est arrivé en tête avec 58 % des voix, selon le décompte des voix qu’ils ont fait à partir des procès verbaux (PV) de dépouillement qu’ils ont réussi à réunir jusqu’ici. En attendant, ils restent « sur la voie de la légalité » et comptent « déposer leur plainte devant la Cour constitutionnelle demain ou après-demain », a-t-il dit.
Malgré cette plainte, le candidat du parti au pouvoir devrait être le prochain président
Le système CNDD-FDD tient, en effet, d’une main de fer tous les rouages du pays. Ni le parti CNL, ni l’opinion burundaise ni encore les diplomates en poste au Burundi, personne ne se fait guère d’illusions sur l’issue de cette plainte du principal parti d’opposition, quelles que soient d’ailleurs les preuves accumulées ou pas.
Le CNDD-FDD, dont Évariste Ndayishimiye était depuis 2016 le secrétaire général, a d'ailleurs exprimé sa « large satisfaction » à la vue des résultats provisoires du triple scrutin. « La victoire d'aujourd'hui est l'expression du peuple burundais qui reconnaît les efforts consentis en vue d'améliorer son bien être par le CNDD-FDD, se félicite Nancy Ninette Mutoni, la secrétaire nationale chargée de la communication du parti. C'est le choix d'un programme politique dans lequel le peuple se sent représenté. Le peuple a librement exprimé sa position par rapport aux divers programmes. Nous remercions et félicitons le peuple burundais qui s'est massivement exprimé par la voie des urnes. »
Ainsi, à l'âge 52 ans, le général Évariste Ndayishimiye sera sans doute le prochain président burundais. Membre du cercle très fermé des généraux issus de l’ancien mouvement rebelle hutu, aujourd’hui au pouvoir au Burundi, et qui détient réellement la réalité du pouvoir dans ce pays, Évariste Ndayishimiye est réputé plus ouvert que son mentor, le président Pierre Nkurunziza, à qui il devra succéder.
Coincé entre ces deux pôles du pouvoir, c’est-à-dire le groupe des généraux et le président Pierre Nkurunziza, il n’aura pas la tâche facile, estiment les spécialistes. Le pays traverse une grave crise, depuis 2005 et son économie est pratiquement en ruines. Il aura donc la lourde tâche de réconcilier les Burundais et de développer un pays tombé parmi les trois plus pauvres du monde sous la direction de son mentor.
La frustration de l'opposition
Avec moins de 70 % pour le candidat du parti au pouvoir, le CNDD-FDD a eu la « victoire modeste » note un spécialiste du Burundi. Mais les 24 % octroyés à Agathon Rwasa « ne correspondent pas au poids réel » du principal opposant burundais, juge la même source. « La campagne électorale lui a donné l’occasion pour la première fois de démontrer combien il est populaire dans le pays », poursuit-il, estimant ce score « volontairement humiliant ».
Après 2010 et 2015, « les militants du CNL ont crû que, cette fois serait la bonne, et ils sont frustrés », explique une source diplomatique, mais ils « sont aussi très disciplinés et attendent les directives de leur leader pour agir ». Que fera alors Rwasa : « Va-t-il se contenter du strapontin qu’on lui offre, ou ruer dans les brancards ? », se demande le diplomate. Est-ce une manière de tenter de calmer le jeu ? Le parti au pouvoir a appelé ses militants à ne pas fêter leur victoire et à éviter toute provocation.
RFI